Ce livre s’interroge sur la place qu’ont occupée les femmes, réputées « querelleuses » selon Richelet, dans les échanges polémiques censés garantir leur foi et mettre une sourdine aux propos de « la philosophie » des Lumières. Lire la suite
Quel rôle exact les femmes ont-elles joué dans le déferlement des affrontements qui ont accompagné la structuration du champ intellectuel et dans l’appropriation positive de disciplines traditionnellement réservées à l’Église et à ses pasteurs ? Dans quelle mesure leur éducation les a-t-elle préparées à ces échanges pro et contra et à la pratique d’une apologétique chrétienne qui, tout au long du XVIIIe, ne cesse de s’ouvrir stratégiquement aux séductions du siècle ? Telles sont quelques-unes des questions qui hantent ce volume.
Depuis Albert Monod, en 1916, il était de coutume de placer l’essor et l’étude de l’apologétique chrétienne entre les terminus a quo et ad quem emblématiques de 1670 et de 1802, soit entre deux œuvres – Les Pensées et le Génie du Christianisme – et deux figures masculines – Pascal et Chateaubriand –, certes écrasantes de maestria, mais qui obéraient une bibliographie prolixe, avec pour effet de galvauder également toute prise de parole féminine.
Loin de céder aux caprices d’une mode académique, le présent volume entend tirer les leçons de la lente acclimatation de l’historiographie française aux études de genres qui a démontré combien cette démarche permettait non seulement de « combler les vides » de l’histoire intellectuelle mais aussi d’affiner la qualité des instruments scientifiques.
En optant pour un titre volontairement ambigu qui recouvre des notions qui se juxtaposent autant qu’elles s’opposent, se croisent ou se confondent, le livre dessine un faisceau d’échanges ou d’interférences, à géométrie variable. Il interroge de la sorte, et de manière féconde, la construction des paradigmes qui ont, depuis la France et la IIIe République, artificiellement structuré les disciplines d’enseignement et de recherche en histoire littéraire et en histoire de la philosophie. En s’attardant sur les zones d’ombre du siècle des Lumières, en rappelant l’intérêt heuristique de polémiques envisagées pour elles-mêmes, il constate le déplacement de ces catégories, outrageusement antagonistes – Lumières, anti-Lumières, antiphilosophie – et trace une voie vers une compréhension plus nuancée de la modernité.
Remerciements
Introduction
Virginie Arantes, Krystel Wanneau et Eric Fabri
Partie I - Perspectives philosophiques
Ontologie naturaliste et propriété : au-delà du vivant comme « appropriandum »
Eric Fabri
Introduction
Nature, maîtrise et propriété
Les racines d'une convergence moderne : Filmer et Locke
Au-delà de l'ontologie naturaliste et du projet de maîtrise
Conclusion
Rendre le vivant politique ou revivifier la politique ?
Philippe Caumières
Introduction
La biopolitique reconnue et mise en question
Raisons de la déconstruction et conséquences pratiques
Revivifier la politique
Conclusion
Partie II - Apports de la sociologie de la traduction
Les écosystèmes face aux catastrophes naturelles : « solution » malgré eux
Krystel Wanneau
Introduction
Cartographie des porte-parole de la réduction des risques
Les porte-parole historiques des savoirs sur les catastrophes naturelles
L'arrivée de porte-parole de la conservation avec le tsunami en 2004
Effets de la circulation des savoirs de l'Eco-DRR
Un recours à la science dans l'expertise du PNUE
Au Japon, un enchevêtrement des écosystèmes avec les savoirs d'ingénierie dans les infrastructures vertes
Aux Nations unies, la consécration des solutions fondées sur la nature
Discussion : l'agir politique des écosystèmes face aux catastrophes
Conclusion
Quand le Parti devient la voix du vivant : parcs nationaux et civilisation écologique en Chine
Virginie Arantes
Introduction
Les parcs nationaux en Chine
Gouvernance des parcs, vivants indésirables
Quand la classe dominante s'érige en porte-parole du vivant
Conclusion : du vivant pour l'humain au vivant pour le vivant
Partie III - Trois thèses pour un (autre) devenir
Prendre conscience ne suffit pas : la constitution des sujets politiques à l’épreuve de l’Anthropocène
Emmanuel Charreau et Marc-Antoine Sabaté
Introduction
Face à l’urgence, une éternelle inconscience ?
L’inconscience écologique comme alibi antidémocratique
Interroger le « nous » de la prise de conscience
De l’inconscience moderne à l’histoire des modes de politisation de l’écologie
Historiciser la question écologique
L’histoire longue des réflexivités environnementales
Ouverture : trois thèses sur la démocratisation de l’Anthropocène
Première thèse : un interlude plutôt qu’une longue nuit d’inconscience écologique
Deuxième thèse : l’Anthropocène comme champ de bataille théorique et politique
Troisième thèse : la nécessité d’hériter de la modernité, pour le meilleur et pour le pire
Bibliographie indicative
Personalia